Chère Ijeawele ou un manifeste pour une éducation féministe – Chimamanda Ngozi Adichie

Chimamanda Ngozi Adichie est une écrivaine nigériane, elle a écrit notamment « Americanah », (que je n’ai pas lu). « Chère Ijeawele » se présente comme une lettre écrite à une amie nigériane, Ijeawele, qui a demandé à l’écrivaine comment donner une éducation féministe à sa fille, Chizalum.

Je n’ai pas vraiment apprécié ce livre. D’abord 8,50 euros pour 68 pages d’écriture, je trouve ça un peu exagéré, mais passons, car après tout le prix d’un livre ne se résume pas à la quantité de mots! Non ce que je n’ai pas apprécié c’est le fait que les conseils présentés dans ce livre ne sont en réalité pas des conseils ou même des « suggestions » comme le suggère le titre original (« A féministe manifesto in fifteen suggestions »), mais bien des injonctions (« ne présente pas », « dis-lui », « ne fais jamais peser ») qui s’adressent donc à une mère pour sa fille, faisant ainsi porter toute la charge de l’éducation féministe sur les femmes. Lorsque j’ai fait cette remarque à ma soeur, elle m’a répondu que « le féminisme est affaire de femmes »… Je ne suis évidemment pas d’accord! Après la charge mentale, la charge émotionnelle, la charge maternelle, les femmes auraient donc aussi la charge féministe!

Ensuite, certains conseils m’ont paru assez déconnectés comme celui de payer sa fille pour qu’elle lise, alors qu’on sait bien que forcer un enfant à lire – qu’on le récompense par une bonne note ou de l’argent d’ailleurs! – peut être contreproductif et dégoûter de la littérature. Surtout qu’elle développe juste avant tout un paragraphe sur la nécessité de conduire l’enfant vers l’autonomie : « apprends-lui l’autonomie, dis-lui que c’est important de faire les choses par elle-même »… Ou encore quand elle dit qu’une mère doit absolument faire en sorte que sa fille lui parle de ses premières expériences amoureuses ou sexuelles : « assure-toi d’être au courant de ses idylles ». Pardon mais je ne vois pas bien pourquoi? Si une fille n’a pas envie de parler à sa mère de ses premiers émois, où est le problème en fait?

Je trouve également qu’elle se contredit souvent… Un exemple parmi d’autres : elle dit avoir de l’affection pour les hommes qui se désignent d’abord comme « mari », puis qu’il ne faut pas accorder une affection particulière aux hommes qui font la cuisine car on n’a pas à les récompenser de faire quelque chose de normal…

Mais le vrai problème est selon moi qu’elle n’adresse pas le problème des préjugés sociaux qui se cachent derrière les injonctions maternelles, comme quand elle écrit : « encourage-la à faire du sport (…) parce que cela peut aider à gérer tous ces complexes liés à l’image du corps que la société projette sur les filles ». En clair : apprends-lui à se soumettre à l’image projetée de la femme dans la société! Ou encore quand elle conseille de ne pas appeler sa fille « princesse », parce que le mot est chargé de présupposés sur le prince qui viendra la sauver, mais le problème n’est pas de combattre le mot « princesse » mais les préjugés qu’il y a derrière, sinon on se plie tout simplement au jeu des stéréotypes sociaux…

Paru aux Éditions Gallimard le 2 mars 2017.

2 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Lucie Néma dit :

    J’ai fini ce livre récemment et contrairement à vous j’ai adoré ce livre.
    Après chacun ses goûts mais pour les gens qui liront cet article je pense qu’il faut clarifier quelques points:

    Pour la question de la lecture, elle encourage son amie à instruire sa fille et surtout à lui apprendre à lire car la lecture est le premier pilier de la liberté. Pour vous ça n’a peut être pas de sens parce que vous avez la chance d’être dans un pays où tout les enfants apprenne à lire. Ce n’est pas le cas de tous les pays du monde, notamment au Nigeria où de nombreuses femmes n’ont pas eu cette éducation (à cause de leur sexe).

    Ce que dit l’auteure quand elle parle des hommes, c’est qu’il ne faut pas trouver incroyable qu’un homme s’occupe de la maison, des enfants et de la cuisine, parce qu’en fait ça devrait être normal. De la même manière quand vos conjoints vous disent que vous avez de la chance d’être avec eux parce qu’ils ne vous frappent pas, il ne faut pas les féliciter parce que c’est normal de ne pas être violent!

    Pour ce qui est des préjugés sociaux, le livre ne parle que de ça. Il ne faut pas faire de confusion, les conseils que donne l’auteure à son amie sur la société son multiple et encore une fois le message qu’elle donne c’est apprends à ta fille à s’aimer elle même, de respecter les différences et de ne pas être ce que les autres veulent voire.

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