Mon coeur à l’étroit – Marie N’Diaye

Marie N’Diaye écrit bien. C’est facile à dire peut être, surtout maintenant qu’elle a eu le Prix Goncourt et que donc tout le monde s’accorde pour la qualifier d’écrivaine.

Sauf que le premier livre que j’ai lu d’elle, je l’ai pris par hasard dans la biliothèque d’Aix. Mon coeur à l’étroit, c’était le titre. Je crois que j’aimais bien la couverture, où figurait une photo floue qui me faisait penser à des peintures de Bacon, allez savoir pourquoi.

Une fois commencé, j’étais captivée, mais pas dans le sens plaisant du terme, comme quand on commence une histoire et qu’on a hate de savoir la fin. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai mis presqu’un mois à le lire : je pouvais pas lire plus de deux pages, parce que ce que racontait Marie N’diaye me dégoutait, quelque part.

L’histoire est simple : un couple de professeurs, dans la banlieue de Bordeaux (ce qu’on apprend que très tard dans le livre), ne comprend pas pourquoi d’un coup tout le monde les regarde avec dégout, leur crache dessus, et pourquoi leurs élèves vont même jusqu’à détourner leur regard quand il entrent dans la classe. Pourquoi ? Jamais ce n’est dit.

Alors chacun imagine. Pour moi c’était au départ simple, j’y voyais la métaphore de l’antisémitisme, c’était facile, ils étaient Juifs et puis voila. Mais en fait, ce n’est même pas ça ou peut-être que si, qu’importe au fond pourquoi, l’importance c’est de comprendre le processus d’ostracisation qui est mis en jeu lorsque tout d’un coup, vous êtes un pourri aux yeux de la société. Mais attention, Marie N’Diaye ne jette pas son opprobe sur la société, elle le jette aussi sur les personnages principaux qui se mettent, au fond, à devenir mauvais, sales, égoïstes. Comme si maintenant, ils avaient une raison d’être détestés.

Tout cela, raconté par un mauvais scribouillard, ne donnerait rien. De l’absurde tout au plus. Une fable politico-civique à la Rousseau. Sauf que Marie N’Diaye écrit bien, je l’ai déja dit je sais. Elle a un style. Et ce qui est fou, c’est qu’au moment où l’on comprend que ce qu’on lit a du style, on est immédiatement incapables de l’expliquer. Ce n’est même plus dans les mots, ni dans leurs agencement. C’est une impression générale qui se dégage et qui reste à l’esprit après avoir refermé le livre. Cela ne tient pas au niveau de langue, ni à la syntaxe, ni même à ce qui est raconté. Un bon livre en fait, selon moi, c’est un livre qu’on continue de lire même quand on l’a fini.

Et moi en ce moment je fais que lire du Marie N’Diaye. Partout, dans le métro, sous la douche, peut être même quand je dors.

Oui, Marie N’Diaye écrit bien.

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